8° chapitre
Le lendemain, bien décidé à avoir une vraie
discussion avec Lucy, Emmett se rendit chez Justin. Lucy et lui étaient en
train de peindre un grand mur blanc aux couleurs d’un arc en ciel avec beaucoup
d’attention, et il fut obligé de toussoter pour se faire remarquer. Les deux artistes
s’excusèrent alors et arrêtèrent leur œuvre avant de rejoindre Emmett.
- Je
suis venu m’excuser à propos d’hier, j’ai réfléchi et je comprends que tu ne
veuilles pas en parler Lucy, annonça alors Emmett.
- Ne
t’en fais pas, ce n’est pas ça, mais ça m’attriste toujours un peu lorsque j’y
repense…
- Et
avec moi, tu peux en parler ? on se connaît bien mais je ne sais pas grand
chose de ton passé…, ajouta Justin qui se sentait de trop.
- Oui,
je peux t’en parler. J’aurai dû le faire avant, je suis désolée.
- Oui,
racontons-lui !!! S’écria alors Emmett.
- Très
bien, Emmett tu vas m’aider.
- Alors,
Lucy est née le 1er mai 1988 à Paris !
- Je
suis impressionnée ! C’est vrai, à ma naissance, mes parents biologiques n’ont
pas pu me garder, ils m’ont donc laissé dans l’orphelinat le plus important de
Paris. Contrairement aux autres, dans cet orphelinat, en plus d’apprendre la
vie, on t’apprend l’art, c’est comme ça que j’ai appris à peindre et
accessoirement à chanter…
- Et
quelle voix !
- J’ai
remporté plusieurs concours de chants avant l’âge de 12 ans et je suis devenue
assez connue. Je me rappelle qu’a cette époque mon meilleur ami, qui avait 6
ans de plus que moi, m’a annoncé qu’il était gay.
- Son
meilleur ami était du même orphelinat qu’elle.
- Un
jour, un homme est venu m’adopter, c’était un riche publicitaire américain, il
m’a dit que je méritais mieux que « cette prison ». Il m’a alors emmené au
Japon, à Tokyo.
- Et
son meilleur ami a décidé de l’accompagner, étant majeur, il pouvait quitter
l’orphelinat.
- C’est
vrai, Andrew a décidé de m’accompagner pour éviter que je ne me sente trop
seule.
- Andrew
est le prénom de son meilleur ami, hein !
- Au
Japon, pendant que mon père faisait des affaires, Andrew et moi avions monté un
petit groupe, au début nous n’étions que deux mais nous avons trouvé de
nouveaux musiciens par la suite. Jusqu'à mes 16 ans, on nous a pris pour un
couple, et là-bas, l’homosexualité est très mal vue alors nous n’avons rien
démenti afin de le préserver d’un scandale. Un jour, peu après l’anniversaire
de mes 16 ans, mon père m’a annoncé que l’on devrait bientôt retourner en
Amérique. Nous avons donc programmé un concert d’adieu avant d’aller tous les
trois dans le pays natal de mon père. Seulement…
- Deux
semaines avant le concert, l’homosexualité de Andrew a été rendue publique par
l’un des ses anciens coups…
- Et
il a été victime d’une agression homophobe…
- …
- Andrew
a fini à l’hôpital et les médecins m’ont dit que son état était critique et
qu’il risquait de perdre l’usage de ses jambes. Je voulais annuler le concert
et rester auprès de lui mais…
- Le
concert n’a pas été annulé.
- Il
m’avait fait promettre de le faire, même sans lui, et il m’a annoncé que
j’irais en Amérique seule.
- Lucy
a été très touchée par l’agression de son meilleur ami et jusqu'à la date du
concert personne n’a pu avoir de ses nouvelles.
- J’avais
promis à Andrew un beau concert dont il pourrait se souvenir. J’avais tout
prévu pour qu’il ait une retransmission en direct depuis l’hôpital, mais ce
concert signerait la fin de ma carrière.
- Le
concert a été magnifique… Lucy s’est vraiment donnée à fond. Et à la fin, elle
a adressé une magnifique chanson à Andrew, tu la connais Justin, elle passe
mixée au Babylon, « Proud ». Pendant qu’elle chantait, derrière elle, un texte
défilait sur un écran géant, un message qui demandait au public d’être tolérant
face à la différence. Je me souviens même qu’à la fin Lucy a fondu en larmes et
a dit : « je t’aime Andrew ».
- Puis
j’ai quitté le Japon et depuis je n’ai plus eu de nouvelles d’Andrew, il doit
être dans un fauteuil roulant désormais…
A ce souvenir, des larmes couvrirent le visage de
Lucy. Justin ne put s’empêcher de la prendre dans ses bras. C’est lui qui avait
insisté pour connaître son histoire et il se sentait coupable.